Le père Noël est passé avant l'heure !!! En entrant dans la Petite Librairie à Brest ce week end, je ne m'attendais pas du tout à trouver mon cadeau "ultime" de Noël ! Que personne ne s'inquiète, cette année je n'ai besoin de rien... je viens de trouver la seule chose qui me manquait !
Un livre, des correspondances, entre Nicolas Bouvier et Theirry Vernet, les deux compères-voyageurs-auteurs de mon livre préféré : L'Usage du Monde.
Nicolas Bouvier-Thierry Vernet. Correspondance des routes croisées (1945-1964), aux éditions Zoé, est un livre dense et riche.
Il retrace la genèse, et les dix années qui ont suivies le voyage en fiat Topolino entrepris par Bouvier et Vernet en 1953 et 1954, et mis en poésie dans le magnifique Usage du Monde.
On découvre deux adolescents - Bouvier, né en 1929, n'a que 16 ans quand s'ouvre cette correspondance - tout juste sortis du lycée, et entrant dans la vie avec une même envie d'ailleurs, de rencontres, de voyages. Ils se livrent l'un à l'autre avec une familiarité, une confiance aveugle et une tendresse sans pareil.
Une relation qui va permettre un rêve commun : ce voyage, en fiat Topolino, de Suisse jusqu'à la pointe sud de l'Inde. Ce qu'ils projetent dans un tel voyage, l'ambition affichée qui en découle de créer un 'Livre Monde", mais aussi parfois les différences de vue, et surtout le partage, de tout, tout le temps : la musique, les vers qui émeuvent, les tableaux qui inspirent (Vernet est peintre).
On voit les hommes naître et devenir. Et c'est beau ! Vernet, enfermé dans ses doutes, fasciné par son ami ; Bouvier pétillant et drôle, vivant, voyageant. On y découvre les dessous du voyage, mais surtout on pénètre dans l'atelier des artistes, en assistant à la lente élaboration du Livre Monde qui deviendra l'Usage du Monde.
Parce que ce livre, c'est d'abord cela : un livre sur les mots. Sur le travail entrepris depuis le début de leur vie sur la création. Fasconner la matière, graphique ou littéraire, pour rendre compte des émotions du monde.
Cette petite phrase de Bouvier, perdu au milieu de la correspondance, l'air de rien : "Il faut que le livre monde sot écrit comme un conte."
Je vous en livre ma phrase favorite, qui me porte chaque fois que j'ai des envies d'ailleurs.
"Comme une eau, le monde vous traverse, et, pour un temps, vous prête ses couleurs. Puis se retire, et vous replace devant ce vide qu'on porte en soit, devant cette espèce d'insuffisance centrale de l'âme qu'il faut bien apprendre à côtoyer, à combattre, et qui, paradoxalement, est peut-être notre moteur le plus sûr." L'Usage du Monde.
