Le dernier livre de Richard Russo, Les sortilèges du Cap Cod est un roman léger et sans prétention, qui a le mérite de l'humour et du sens de la formule, sur un sujet difficile : la fin de l'amour, l'usure, au bout de trente ans de mariage ; mais pas uniquement, sur l'impossibilité d'échapper à ce qui nous constitue : notre enfance.
Et pour Jack Griffin, narrateur héros de ce récit, c'est du lourd ! Ses deux parents, enseignants à l'université, un peu dépités de ne pas avoir eu la chance d'être nommés dans un établissement prestigieux, ne décolèrent pas de croupir dans ce "Midwest de merde", comme ils le répètent à longueur de temps.
Des parents trop occupés d'eux-mêmes, de leur amour, de leur mépris du monde, de leurs déchirures, pour regarder leur enfant unique (une chance ! eux qui haïssent cordialement les enfants n'en ont eu qu'un !!). Des parents trop inquiets pour aider Jack à grandir.
Et pourtant, c'était pas si mal, ce que Jack avait construit. A commencer par se femme, Joy, et sa grande fille de 20 ans, Laura. Oui mais voilà, on n'échappe pas à son enfance bancale et à sa jeunesse mal étayée. Et on échappe encore moins aux sortilèges de ce bon vieux Cap, où enfant, il a passé toutes ses vacances.
A la fois tendre et amer, ce récit de la filiation et de l'amour en fuite se lit très facilement ; presque tout seul. Mais c'est sans compter sur la voix insistante de cette mère, à la fois cruelle et juste, et qui à force de nous agacer finit par nous attacher à elle...
